Le numérique permettra l'égalité scolaire
Notre monde est de plus en plus, et sans aucun doute, un monde fondé sur le mérite, au sein duquel le plus grand défi à relever pour toute entreprise porte sur le
capital humain et sur les moyens pour le trouver, le développer et le fidéliser. Quel que soit le secteur concerné, les salariés sont plus productifs, et ce grâce aux progrès numériques – créant des emplois inexistants voilà seulement quelques années et nous libérant des anciennes tyrannies du temps et de la distance.
capital humain et sur les moyens pour le trouver, le développer et le fidéliser. Quel que soit le secteur concerné, les salariés sont plus productifs, et ce grâce aux progrès numériques – créant des emplois inexistants voilà seulement quelques années et nous libérant des anciennes tyrannies du temps et de la distance.
Ce postulat est vrai dans tous les secteurs, sauf un : l'Éducation. Réfléchissez un instant. Dans un aspect de la vie sur deux, une personne qui se réveillerait après cinquante ans de sommeil ne reconnaîtrait pas le monde qui l'environne. Rien de tel dans l'éducation. Nos écoles demeurent le dernier obstacle à la révolution numérique. Pour la personne qui se réveillerait après cinquante ans de sommeil, l'aspect de la classe serait quasiment identique à celui existant à l'époque victorienne : un maître se tenant devant une classe remplie d'enfants, avec uniquement un manuel scolaire, un tableau noir et un morceau de craie. Nous sommes ici en présence d'une faillite colossale de l'imagination.
Nous savons que la réponse traditionnelle – qui se résume à injecter de l'argent afin de résoudre le problème – ne fonctionne pas. Dans mon propre pays, nous avons doublé nos dépenses relatives à l'enseignement primaire et secondaire au cours des trente dernières années : or, les résultats aux examens sont restés inchangés.
Les mandarins de la médiocrité vous diront que le problème vient du fait que les enfants auxquels ils dispensent un enseignement sont trop pauvres voire sont issus de familles peu fréquentables ou sont des immigrés qui ne comprennent pas notre culture. Cette affirmation est absurde, arrogante, élitiste et totalement inacceptable. Nous disposons de moyens pour transformer l'existence. Les mêmes technologies numériques qui ont modifié un aspect de la vie moderne sur deux peuvent transformer l'éducation.
Je souhaiterais donner trois exemples. Nous devons commencer par exciter l'imagination de nos jeunes. La clé, ce n'est pas l'ordinateur ou la tablette voire un dispositif quelconque mais le logiciel qui impliquera les étudiants, leur enseignera les concepts et leur apprendra à penser par eux-mêmes. Toutes les études vous diront que plus l'enseignement est interactif et personnalisé, plus les résultats de l'étudiant s'améliorent.
Prenons un exemple. Si je tentais d'enseigner à un enfant de 10 ans le principe de Bernoulli qui tire son nom du célèbre mathématicien du 18e siècle. Selon ce principe, lorsque la vitesse augmente, la pression diminue. Hypothèse quelque peu aride. Or, que se passe-t-il si je peux relier la leçon à la star de football Roberto Carlos – dont la légendaire frappe enveloppée illustre ce principe en action ? Plusieurs entreprises nous donnent déjà une idée de la forme qu'il pourrait revêtir. Dans deux petites écoles en Californie, un éditeur traditionnel de manuels scolaires s'est associé avec Apple pour enseigner l'algèbre. Ils ont fourni aux enfants des iPads gratuits et ont créé une application procurant aux étudiants un guide d'instructions, un feed-back instantané sur des questions liées à la pratique et un accès à plusieurs centaines de vidéos. Si les élèves ne comprennent pas la leçon la première fois, ils peuvent la regarder autant de fois qu'ils le souhaitent.
Seriez-vous surpris d'apprendre que les étudiants utilisant ce nouveau programme d'algèbre réussissent mieux leurs examens que ceux qui n'y ont pas recours ? Exciter les jeunes imaginations me conduit directement à mon second point : un enseignement plus personnalisé. Dans le domaine des médias, nous avons appris la façon de micro-cibler les publics - maximiser l'attractivité de nos sites Web, personnaliser nos services d'alimentation en nouvelles. Dorénavant, nous devons intégrer ces types de compétences dans l'éducation – préserver l'attractivité des mathématiques – dans le but de micro-cibler les filles en quatrième qui souhaiteraient devenir physiciennes et personnaliser l'interprétation pour chaque étudiant.
Prenons l'exemple d'un étudiant qui essaie de comprendre les fractions. Il existe de nombreuses façons différentes de les enseigner aux enfants – toutes fonctionnent pour certains d'entre eux et ne fonctionnent pas pour d'autres. Pourquoi devrait-on être limité ? Pourquoi ne peut-on pas utiliser la technologie numérique pour offrir aux enseignants la possibilité de choisir la totalité d'entre elles ? Par exemple, pour certains enfants, la réponse la plus adaptée sera un professeur particulier en ligne qui les guidera à chaque étape de leur parcours. Pour d'autres, cela pourra être un dessin animé produit par les meilleurs studios d'animation du monde illustrant le mode de représentation des fractions en tant que parties d'un tout. Pour d'autres encore, il s'agira d'écouter le plus grand professeur de mathématiques de la nation poser des problèmes auxquels ils répondront à leur propre rythme. La clé, c'est la capacité à analyser les domaines où les enfants sont en cours d'acquisition de connaissances et les moyens qui leur sont nécessaires pour progresser.
Nous disposons déjà d'un programme analogue que nous avons installé sur un iPod, qui est utilisé dans les écoles et destiné aux enfants américains sur la base militaire d'Okinawa. Il permet à un enseignant de diagnostiquer instantanément le niveau de lecture atteint par un enfant, puis d'élaborer un manuel scolaire personnalisé pour les dix jours suivants. Le parent peut le vérifier à tout moment pour évaluer la progression de son enfant en termes d'acquisition de connaissances. Enfin, grâce au numérique, nous pouvons proposer les plus grands penseurs du monde à chaque étudiant, aux quatre coins du monde, à très faible coût.
Hors de la classe, le numérique a déjà rempli ce rôle. Il n'y a pas si longtemps, il fallait être riche pour écouter l'opéra ou la symphonie de la meilleure facture. Vous pouvez dorénavant télécharger le meilleur enregistrement mondial de votre concerto préféré de Mozart pour environ un dollar. Ainsi, si un enseignant en Bretagne propose le meilleur cours d'enseignement de l'histoire de France, il n'y a aucune raison de ne pas le mettre immédiatement à la disposition de tout étudiant dans la France entière ou au Vietnam.
Notre défi consiste à tirer les leçons des pratiques les plus performantes et de les réunir. Mon entreprise est plus que jamais résolue à faire partie de cette expérience sur une grande échelle. Mon défi à l'égard des autres : leur permettre de proposer leurs propres compétences. Le monde a besoin de vous pour insuffler dans nos écoles la même force créative qui permet aux entreprises d'être compétitives et aux nations de prospérer.
Ce faisant, nous fournirons à nos économies tout le talent et l'énergie dont elles ont besoin pour croître, nous veillerons à ce qu'un enfant pauvre à Manille bénéficie des mêmes opportunités qu'un enfant riche à Manhattan, nous rehausserons le statut des bons enseignants dans le monde entier et nous ferons en sorte qu'aucun enfant ne soit laissé en marge de la formidable prospérité offerte par cette économie mondiale
منقول من جريدة Le Monde
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